Forte d'une volonté de protection de la ressource en eau sur son territoire, la Métropole de Montpellier a voulu repenser le cycle de l'eau dès 2018. C’est dans ce cadre qu’a vu le jour le programme de gestion active des eaux usées traitées, porté par 3M, Aqualter et DV2E. Celui-ci s’est déroulé durant 4 années, de 2018 à 2021.
L’intérêt de ce projet est d’étudier la possibilité de réutiliser cette ressource en sortie de station d’épuration en interrogeant les moyens techniques, socioéconomiques ainsi que les risques sanitaires environnementaux de cette pratique. Il se traduit en huit actions :

Cela a permis d’étudier :
- Les moyens de mise en place d’un projet de réutilisation des eaux usées traitées (REUT) en sortie de station d’épuration sur la commune de Saint-Drézéry en 2020 ;
- L’impact du prélèvement de l’eau sur le milieu naturel (cours d’eau récepteur du rejet de la station d’épuration) ;
- L’impact de l’irrigation de cultures par l’eau réutilisée sur la biodiversité des parcelles irriguées (faune et flore) ;
- La faisabilité de déployer ce type de projet sur d’autres communes du territoire de la Métropole de Montpellier ;
- Les risques sanitaires associés à l’utilisation de cette eau pour la lutte contre l’incendie et le nettoyage des réseaux d’eaux usées ;
- L’impact du temps de stockage sur la qualité des eaux usées traitées.
Bien que ce programme se soit clôturé en 2021, le projet de réutilisation des eaux usées traitées mené sur la commune de Saint-Drézéry perdure afin de continuer les actions initiées sur les deux parcelles adjacentes à la station. Il a pour vocation d’évoluer vers la création d’un jardin potager irrigué avec des eaux usées traitées.
Qu'est-ce qu'une eau usée traitée ?
L’eau usée est le résultat de nos activités qu’elles soient domestiques, industrielles ou autres. Elle est majoritairement composée d’excréments humains et d’eau ayant servi à différents usages. Elle est très souvent acheminée via un réseau d’assainissement pour rejoindre une station d’épuration où elle est alors traitée pour atteindre un niveau de qualité acceptable pour le milieu récepteur et ses enjeux (écologiques, touristiques, économiques…).
Comment le traitement de l'eau est réalisé sur le territoire de la Métropole de Montpellier ?
Les dispositifs de traitements varient selon les stations d’épuration. Lorsque le milieu récepteur du rejet est un milieu défini comme sensible (lagune, …), des traitements supplémentaires sont nécessaires. Ils sont appelés traitements tertiaires. Globalement, les eaux usées passent par des processus de prétraitements, traitements primaires, secondaires (biologique) et tertiaire :
1. Prétraitement : consiste à une séparation physique des eaux et des éléments les plus grossiers présents dans celles-ci. Les eaux usées passent ainsi dans des dispositifs de dégrillage, dessablage et déshuilage.
2. Traitement primaire : traitement physico-chimique. L’intérêt est de récupérer un grand nombre de particules en suspension par décantation ou flottation.
3. Traitement secondaire : procédé biologique qui permet de réduire la concentration de matières organiques restantes dans les eaux. Les procédés sont généralement anaérobies (permet l’élimination des bactéries ayant besoin de dioxygène pour vivre).
4. Traitement tertiaire : permet de répondre à un objectif de qualité prédéfini (qualité de rejet pour le maintien de l’état écologique du cours d’eau récepteur du rejet ou autres).
Est-ce que la réutilisation des eaux usées traitées est encadrée par la réglementation française ?
La Réutilisation des Eaux Usées Traitées (REUT) est une pratique réglementée en France depuis 2010 par l’arrêté du 2 août relatif à l’utilisation d’eaux issues du traitement d’épuration pour l’irrigation de cultures ou d’espaces verts. Celui-ci a été modifié par l’arrêté du 25/06/2014 ainsi que par l’instruction interministérielle du 26 avril 2016 relative à la réutilisation des eaux usées traitées pour l’irrigation de cultures ou d’espaces verts. Il fixe des seuils physico-chimiques et microbiologiques selon différents usages.
En complément, le décret n°2022-336 du 10 mars 2022 relatif aux usages et aux conditions de réutilisation des eaux usées traitées permet l’autorisation de nouveaux usages tels que la lutte contre l’incendie, l’hydrocurage, le nettoyage de voieries …
Remarque : depuis le 25 mai 2020, un règlement européen encadre l’utilisation des EUT pour l’agriculture. D’ici mai 2023, l’ensemble des projets de REUT sur le territoire français devront se conformer aux règlement européen et français. Un texte de loi doit être rédigé afin d’établir une réglementation intégrant les exigences des deux textes de loi.
Quels paramètres analytiques sont analysés pour caractériser le niveau de qualité sanitaire selon la réglementation française ?
Le niveau de qualité des eaux usées traitées est réparti en quatre catégories, allant de l’eau classée de bonne à moins bonne qualité : A, B, C et D. Pour les définir, différents indicateurs sont analysés :
1. Indicateurs physico-chimiques: ils permettent de mesurer la pollution physico-chimique de l’eau par la présence de Matières En Suspension (MES) ainsi que par la quantité de polluants organiques et minéraux présents dans l’eau (Demande Chimique en Oxygène DCO) ;
2. Indicateurs biologiques : il s’agit d’indicateurs biologiques permettant de quantifier la concentration en bactéries, notamment par la présence d’Escherichia Coli, Entérocoques fécaux, spores de bactéries sulfito-réductrices ou encore de virus tels par l’identification des phages ARN f-spécifiques.
Quels paramètres analytiques sont analysés pour caractériser le niveau de qualité sanitaire selon la réglementation européenne ?
Tout comme pour la réglementation française, le règlement européen classe les eaux selon quatre qualités allant de l’eau classée de bonne à moins bonne qualité : A, B, C et D. Pour les définir, différents indicateurs sont analysés :
1. Indicateurs physico-chimiques: ils permettent de mesurer la pollution physico-chimique de l’eau par la présence de Matières En Suspension (MES) ainsi que par la quantité de matière organique biodégradable contenue dans une eau (Demande Biochimique en Oxygène DBO5) ;
2. Indicateurs biologiques : l’indicateur principal est la présence d’Escherichia Coli dans les eaux. Des indicateurs additionnels comme les coliphages totaux, F-spécifiques et les spores de Clostridium perfringens doivent être suivis dans le cadre de l’utilisation d’une eau de qualité A (très bonne qualité).
En comparaison avec le règlement français, le suivi de certains indicateurs bactériologiques n’est pas exigé (spores de bactéries anaérobies sulfito-réductrices…) pour toutes les qualités (seulement pour l’eau de catégorie A). De plus, les seuils liés à la présence de la bactérie Escherichia Coli sont plus stricts dans le texte européen.
Est-ce que les risques sanitaires sont pris en compte lors de ce projet et comment ?
Pour que la mise en place d’un projet de REUT soit acceptée, un dossier de demande d’autorisation est obligatoirement requis pour validation auprès d’institutions étatiques et du préfet. Ces institutions sont composées de l’Agence Régionale de Santé (ARS) ainsi que la Direction Départementale des Territoires et de la Mer (DDTM). Celles-ci ont pour rôle de juger des risques sanitaires et environnementaux préalablement identifiés dans ce dossier.
Concernant le projet de Saint-Drézéry, par exemple, le risque sanitaire identifié provient principalement d’une contamination liée à l’exposition directe des eaux usées traitées au sein de la STEU (exploitants de la STEU), au niveau du stockage (gestionnaire de la cuve de stockage) ainsi qu’au moment de distribution de ces eaux à la parcelle.
Pour maîtriser ces risques, des mesures complémentaires ont été prévues avant l’installation du projet de REUT. Elles se composent notamment d’une phase de sensibilisation au risque destinée auprès des différents intervenants, un système de sécurisation de la cuve de stockage ainsi qu’un panneau d’information à l’entrée de la STEU. Les parcelles irriguées sont clôturées.
Est-ce que les eaux usées traitées présentent un risque pour la santé ?
Les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) relative à la réutilisation des eaux usées ne font pas l’objet d’évaluation quantitative des risques faute de références relatives aux doses infectantes par voie respiratoire et de données suffisantes pour une évaluation de l’exposition au risque. Néanmoins les conditions de réutilisation et les pratiques encadrées par la réglementation doivent être respectées.
Pourquoi devons-nous mettre en place une démarche d'économie circulaire autour de l'eau ?
La ressource en eau est au cœur des enjeux environnementaux, sanitaires, sociaux et économiques actuels. De nombreux facteurs impactent durablement cette ressource : le changement climatique avec notamment la baisse des précipitations terrestres ; l’augmentation de la démographie induisant un accroissement de la demande en eau, etc. Ces éléments mènent à la nécessité de reconsidérer la ressource en eau dans son ensemble. Ainsi, repenser les modes de production et de consommation de l’eau vise à augmenter l’efficacité de l’utilisation de la ressource et de diminuer notre impact sur l’environnement.
Est-ce que je peux consommer des légumes et des fruits irrigués avec de l'eau usée traitée sans risques ?
L’irrigation des espèces végétales consommables avec des eaux usées traitée est réglementée et suivie de près. La qualité de l’eau utilisée est de très bonne qualité et doit être conforme à des seuils réglementaires. Des techniques d’irrigation adaptées permettent de limiter très fortement tout risques associés. C’est pourquoi il est possible de consommer des légumes et des fruits irrigués avec des EUT de qualité.
Y a-t-il des pays qui pratiquent régulièrement la réutilisation des eaux usées (REUT) et si oui, lesquels ? Quels sont les volumes d'eau économisés lors de la REUT ?
La réutilisation des eaux usées traitées est une pratique très ancienne dans certains pays confrontés à des pénuries d’eau chroniques. C’est le cas, par exemple, d’Israël qui réutilise aujourd’hui 91% des eaux usées traitées, majoritairement pour un usage agricole. Ce recyclage concerne près de 300 millions de m3 d’eau par an soit 15% de la consommation totale d’Israël. Cette activité est largement utilisée dans le monde comme en Australie, Californie, Chypre, Espagne ou encore en Jordanie, Malte et Singapour.
En France, les journées des Assises de l’eau concluent sur la nécessité de tripler l’usage des ressources dites non conventionnelles (eau de pluie, eaux usées…). Actuellement, seulement 0,6 % des eaux usées traitées sont réutilisées sur le territoire français.
Quels sont les autres projets de REUT mis en place sur le territoire français ?
En 2017, 118 cas de REUT ont été recensés. Néanmoins, seulement 58 sont actuellement en fonction. Ces projets se situent majoritairement sur les littoraux ou dans des zones dépourvues en eau.
1. Porquerolles (1980) : il s’agit d’un des premiers projets apparus en France. La REUT est utilisée pour la suppression du rejet de la STEU dans un milieu côtier sensible à la pollution organique et microbiologique (zone de baignade). Elle permet également de limiter les prélèvements sur les ressources souterraines locales et fragiles.
2. Roquefort-des-Cordières (2017) : dans une zone dépourvue en eau, la pratique de REUT permet aux viticulteurs de la zone d’irriguer une petite partie de leur vignoble impacté par les effets du dérèglement climatique. Cette installation permet l’irrigation de 15 ha de vignes.
3. Golf d’Agde (2019) : afin de limiter l’utilisation de l’eau potable pour l’irrigation du golf, la commune a voulu substituer cette ressource avec des eaux usées traitées. Ainsi, 200 000 m3 d’eau usée traitée par an sont utilisés pour cet usage.
4. Sables-d'Olonne (2021) : les gestionnaires publics et privés se sont associés pour lancer un projet de traitement des eaux usées à des fins domestiques. L'idée est de transformer ces eaux usées en eau brute destinée à l’eau potable pour limiter les pénuries d'eau liées au réchauffement climatique.
Si malgré cette FAQ nous n'avons pas réussi à répondre à l'ensemble de vos questions ou si vous souhaitez des précisions n'hésitez pas à nous contacter via le bouton ci-dessous.